02/11/2025 arretsurinfo.ch  8min #295157

Le 25e plan de paix en Palestine est en marche. En attendant le 26e !

Par  Guy Mettan

Par  Guy Mettan

Le plan de paix élaboré par Donald Trump et Benjamin Netanyahu réussira-t-il à rétablir la paix en Palestine ? L'histoire des 25 plans, initiatives et autres feuilles de route proposés depuis 1947 n'incite pas à l'optimisme. Dans une quinzaine de cas, des accords sont parvenus à mettre fin aux effusions de sang et à établir des cessez-le-feu provisoires. Mais tous les projets ont échoué à bâtir une paix durable. Le programme en 21 points de Trump-Netanyahou n'échappera pas à la règle. Le petit rappel suivant nous montre pourquoi.

Notons qu'il est impossible d'établir une liste satisfaisante des propositions, initiatives et plans de paix qui ont émaillé le conflit israélo-palestinien depuis 78 ans, tant leur variété est grande. Traités officiels, initiatives régionales, propositions diplomatiques, accords intérimaires, négociations privées se bousculent à raison d'un événement tous les trois ans en moyenne. Même l'intelligence artificielle n'y retrouve pas ses petits. Pour ma part, j'ai retenu les 25 initiatives diplomatiques qui m'ont paru les plus significatives.

1. Novembre 1947. Plan de partage de l'ONU. La Résolution 181 de l'Assemblée générale des Nations Unies vote la partition de la Palestine mandataire en deux États (un juif, un arabe) et le statut international de Jérusalem. Refusé par les dirigeants arabes, ce plan débouche sur la création de l'Etat d'Israël et déclenche la guerre de 1948 et la « Nabka », l'expulsion forcée de centaines de milliers de Palestiniens de leurs terres historiques.

2. 1949. Accords d'armistice. L'ONU et les États belligérants fixent des lignes d'armistice entre Israël et ses voisins (qui deviennent les frontières de fait d'Israël jusqu'en 1967). Mais il n'y a pas de règlement final du statut palestinien.

3. 1967. Plan Allon. Proposé après la guerre des Six Jours par le ministre israélien Yigal Allon, le projet vise à garder certaines zones stratégiques en Cisjordanie tout en proposant une autonomie limitée aux Palestiniens. Il ne fut jamais mis en œuvre comme accord bilatéral.

4. 1969. Plan Rogers. Le Secrétaire d'État américain William Rogers tente de négocier un retrait israélien et un règlement pacifique. Ses tentatives restent sans résultat.

5. 1973. Conférence de Genève. A la suite de la guerre du Kippour, les États-Unis, l'URSS, Israël, l'Égypte et la Jordanie proposent une paix basée sur la résolution 242. C'est un échec : la Syrie boycotte la conférence en raison de l'exclusion de l'OLP et de l'absence de solution pour les Palestiniens. L'année suivante, l'OLP est reconnue comme représentant du peuple palestinien (résolutions 3210 et 3236) et obtient le statut d'observateur permanent (résolution 3237) auprès de l'ONU.

6. 1978. Camp David I. Anouar el Sadate et Menahem Begin signent un traité de paix entre Israël et l'Égypte sous l'égide du président Jimmy Carter. Le Sinaï est rendu à l'Egypte. C'est un succès régional mais qui ne résout pas la question centrale de la Palestine.

7. 1981-1982. Plans Fahd et Brejnev. Soutenu par la Ligue arabe, le premier plan vise à créer un État palestinien dans le cadre des frontières de 1967. En septembre 1982, après le sommet arabe de Fès, Moscou présente un plan Brejnev en six points, qui reprend les mêmes bases. Mais en juin déjà, Israël a envahi le Liban dans l'espoir de marginaliser l'OLP et de faire capoter les plans arabo-soviétiques.

8. Décembre 1988. Discours historique à l'ONU à Genève. L'Assemblée générale des Nations Unies siège exceptionnellement à Genève pour permettre à Yasser Arafat, chef de l'OLP interdit d'accès aux Etats-Unis, de s'exprimer. Ce dernier prononce un discours célèbre devant l'Assemblée, déclare renoncer au terrorisme et proclame en substance : « Je suis venu portant un rameau d'olivier et un fusil de combattant de la liberté. Ne laissez pas tomber le rameau d'olivier de ma main. » Il propose un plan de paix en trois points qui reste sans suite. Toutefois, le 15 décembre, l'Assemblée reconnaît l'indépendance de la Palestine par 104 votes contre 36.

9. 1991. Conférence de Madrid. Les Etats-Unis, l'URSS et une coalition de divers pays lancent pour la première fois des pourparlers directs multilatéraux et bilatéraux entre Israéliens et Palestiniens. La conférence sert de point de départ pour Oslo.

10. 1993-1995. Accords d'Oslo I et II. Israël et OLP, avec une médiation norvégienne et américaine, se mettent d'accord pour la reconnaissance mutuelle d'Israël et de l'OLP, la création de l'Autorité palestinienne et un calendrier d'autonomie intérimaire. Dans un second temps, on s'accorde sur la répartition des zones A/B/C en Cisjordanie et le transfert de compétences. Mais les négociations sur le statut final s'enlisent. En février 1994, un extrémiste juif massacre 29 fidèles musulmans au Tombeau des Patriarches et, le 5 novembre 1995, un autre fanatique juif assassine le premier ministre israélien Yitzhak Rabin, partisan d'un accord.

11. 1997-1998. Accords complémentaires (Protocole d'Hébron, Wye River Memorandum). Israël, l'Autorité palestinienne et les Etats-Unis procèdent à des ajustements territoriaux, des mesures de sécurité et des retraits limités. Des accords sont signés mais leur mise en œuvre reste aléatoire et fragile.

12. 2000 et 2001. Sommet de Camp David II et accords de Taba. Ehud Barak pour Israël, Bill Clinton pour les Etats-Unis et les leaders palestiniens tentent d'élaborer un statut final et de régler le problème des frontières et des réfugiés. Sans effet tangible.

13. Déc. 2000-Janv. 2001. Paramètres de Clinton. L'Administration Clinton propose un compromis sur les frontières, Jérusalem et les réfugiés. Un cadre de référence est fixé mais rien n'est signé.

14. 2002-2007. Initiatives de paix arabe. La Ligue arabe, à l'initiative à nouveau de l'Arabie saoudite, propose la reconnaissance d'Israël en échange d'un retrait aux frontières de 1967, une solution globale pour les réfugiés et Jérusalem ainsi qu'une offre de paix globale avec les pays arabes. Intérêt poli mais pas de mise en œuvre formelle.

15. 2003. Feuille de route pour la paix. Le Quartet (États-Unis, UE, Russie et ONU) propose un plan en trois phases menant à un État palestinien vivant côte à côte avec Israël, fixant des étapes et des critères de mise en œuvre. Accepté sur le principe mais bloqué par des violences et des désaccords divers.

16. 2003. Initiative de Genève. A l'initiative de la société civile, des négociateurs israéliens et palestiniens, dont Yossi Beilin et Yasser Abed Rabbo, esquissent un accord permanent détaillé sur les frontières, Jérusalem, les réfugiés et sécurité basé sur les Paramètres de Clinton et la Feuille de route. Modèle utile mais sans suite officielle.

17. 2001-2003. Plans Zinni et Tenet. Des médiateurs américains et des émissaires internationaux élaborent des plans pour un cessez-le-feu et des garanties de sécurité commune assortis d'une feuille de route pour des négociations finales. Accueil plus que mitigé.

18. 2007. Conférence d'Annapolis. G. W. Bush, Israël et l'Autorité palestinienne relancent des négociations pour parvenir à un État palestinien et mettre en place la feuille de route pour des négociations bilatérales sur le statut final. Le processus avorte.

19. 2008. Plan Olmert et propositions israéliennes. Plusieurs gouvernements israéliens successifs (Olmert, Netanyahu) offrent des concessions territoriales en échange de garanties de sécurité, dont un plan avec retraits massifs et échanges de territoires. Ces discussions bilatérales restent sans accord final.

20. 2013-2014. Initiative Kerry. John Kerry lance des négociations bilatérales intensives sur les frontières et la sécurité. Elles sont rompues début 2014.

21. 2014. Plan Abbas. Mahmoud Abbas tente d'obtenir une reconnaissance internationale et multiplie les initiatives diplomatiques et les demandes à l'ONU. Pas de traité signé.

22. 2020. Plan Trump I Peace to Prosperity (« Deal of the Century »). Après avoir transféré l'ambassade américaine à Jérusalem en 2018, les Etats-Unis proposent une feuille de route économique et politique dessinant un État palestinien non-contigu sous conditions. Large acceptation en Israël mais rejet par les dirigeants palestiniens qui n'y ont pas été associés.

23. Septembre 2020. Accords d'Abraham. A l'initiative américaine toujours, des accords de reconnaissance mutuelle et de coopération sont signés entre Israël et les Emirats Arabes Unis d'une part et Israël et Bahreïn d'autre part, suivis par le Maroc et le Soudan. L'annexion de la Cisjordanie est « suspendue ». Pas de référence aux Palestiniens.

24. Années 2000-2020. Initiatives diverses (Munich Group, Quartet). Des États (Allemagne, France, Egypte, Jordanie, USA, UE) tentent de relancer le processus via des groupes multilatéraux et des sommets régionaux. Ces efforts diplomatiques sporadiques restent sans effet.

Divers plans de cessez-le-feu et accords humanitaires sont également proposés sous la médiation de l'Égypte, du Qatar et de la Turquie. Des accords de cessez-le-feu ponctuels, d'échanges de prisonniers, des trêves humanitaires ont lieu en 2008-09, 2012, 2014, 2021, 2023-2025. Ils sont respectés brièvement et n'ouvrent sur aucune solution politique globale.

25. Plan de paix pour Gaza (Trump II). A la suite de l'attaque du Hamas du 7 octobre 2023 contre Israël et des deux ans de guerre et de massacres qui s'ensuivent, Trump propose un nouvel accord de paix en vingt points. Un cessez-le-feu et une libération des otages israéliens et des prisonniers palestiniens ont lieu. Un sommet de chefs d'Etats réunis à Sharm-el-Sheikh est supposé mettre en œuvre une paix à long terme et la reconstruction de la bande de Gaza sous l'égide d'une gouvernance de type mandataire dirigée par Tony Blair. Le Hamas et les Palestiniens en sont exclus. Pas de mention d'un Etat palestinien. Ni du retour des réfugiés.

Conclusion : il n'y a aucune chance, au vu des précédents historiques susmentionnés, pour que ce plan réussisse mieux que les précédents même si, dans un premier temps et comme de nombreux accords antérieurs, il aura eu le mérite de mettre temporairement fin aux massacres. Tant qu'Israël, qui domine les Palestiniens sur tous les plans, n'acceptera pas de partager le pouvoir ou de laisser une place à un Etat palestinien, aucun accord de paix réel n'est possible.

Par  Guy Mettan, journaliste indépendant

 Arrêt sur info, 2 novembre 2025

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